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6.12.14

Réverbère2015

Jardinier d'un roi

Somme tout, mon temps est précieux.Des douze, il ne m'en reste plus qu'un. Décembre, et merci 2014. Comment est le vôtre? Votre temps.
À vrai dire, je n'en suis pas certain. Est ce que le temps du jardinier-horticulteur est moins précieux que celui du chef d'orchestre, du chef d'une organisation redoutable, du chef d'un état  corrompu ou démocratique,du boucher, du retraité? allons voir! La juste réponse devrait se trouver dans celle à choix multiples. A,B,C,ou D avec: Toutes ces réponses sont justes.Si je suis le jardinier du roi, vous conviendrez que mon temps vaut son pesant d'or.Surtout si c'est le Roi-Soleil, l'homme jardinier de la cour, ce André Le Nôtre.Vous êtes en première.

Et la foule? Agenouillée dans un jardin communautaire, la masse populaire, le nombre illimité, les milliards de bouche à nourrir, jour après jour.Les voilà, l'épaule à la roue.Mais allons! Parmi ces participants ou participantes, il y en a qui portent une coupe vestimentaire toute particulière, comme une griffe à la Tilly. Au moment de déplier le dos,le regard se répand.C'est simplement observable. Ces gens sont là, parfois les dimanches, à se construire un plaisir de jardin.

Nombreux se meuvent à pied, d'autres à vélo et certains qu'en voiture. Ils et elles sont tous et toutes du quartier et susceptibles d'être un jour ou l'autre croisés dans la rue, vus à l'épicerie ou à la pharmacie du coin.
Et leur temps joue dans tous les sens, dans le mouvement, dans les lectures en ligne, dans les recherches portant sur un légume préféré,une fraise, une semence.
Dans cette conscience à vouloir du frais, il n'y a pas que les bras d'engagés. Tout le reste du corps penche vers l'action. Les obscures pensées comme les pensées joyeuses et apaisantes.
Jardiner est un mal. Un mal de vivre et de nourrir une passion divertissante, ici et ailleurs sur terre. Oui, heureux comme deux Danois, les plus heureux du monde, semble-t-il.

1.12.14

Réverbère 122014




Une feuille anonyme

Depuis la nuit des temps, le temps est précieux. Des douze mois au calendrier, il n’en restait plus qu'un et c'était décembre. Merci à l'année écoulée. Mais à bien réfléchir, comment était le vôtre, votre temps, la nuit?
Une nuit de novembre pendant laquelle le vent su s’inviter, j’entendis une sorte de déchirement douloureux et aigu, me tirer du sommeil.
Qu'arrive-t-il?
Chez le voisin trônait un énorme pin écossais composé de quelque millions d’aiguilles vertes ou brunes, surplombant le mur frontal de l’immeuble. C’est là que se trouvait le seul géant de son espèce qui encore occupait le paysage de ma rue. Les autres étaient ensemble disparus.
Je me suis dit : c’est fait! Ce même bruit dérangeant de tantôt provient sans doute d’une branche maîtresse, brisée, déchirée à l’horizontale, et que le vent s’obstine à traîner au sol. Ce même arbre qui me privait du soleil matinal; j’en étais presque ravi à l’entendre gémir dans sa nuit et d’imaginer même sa couronne en détresse se rompre puis être abandonner au destin. C'était injuste et trop demander.
Mais une fois debout, la porte-fenêtre de la chambre entrouverte, je compris, en présence de la lune, mon leurre et  la déception monter. Ce que j’avais perçu dans le silence de cette nuit particulière n’était nul autre que le frottement d’une simple grosse feuille desséchée, mue par le vent et, tourbillonnant à la surface du balcon. Celle-ci, semblable à une araignée géante, se mouvait sur ses pointes fragiles.


Venue d’un arbre environnant, cette grosse feuille anonyme, en voie de devenir matière organique, s'était échouée sur un balcon, notre balcon, et avait exprimé à sa façon,dans un bruissement très naturel; que même une simple feuille vieillie ne disparaît jamais sans venir vous dire au revoir et, à la saison prochaine.

Comme à chaque mois ce texte est publié dans le Réverbère, bulletin mensuel de la Société francophone de Victoria, Canada.